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Chirurgie réparatrice

Introduction

Au début de notre expérience, nous avons  utilisé le lipomodelage du sein comme simple complément de la reconstruction mammaire. Rapidement, du fait de son efficacité remarquable, cette technique a pris une place centrale en chirurgie plastique du sein, et a actuellement de nombreuses indications. L’expérience acquise avec cette technique nous a permis d’obtenir des résultats très bons, tels qu’il n’était pas possible d’obtenir avec les techniques classiques. Aussi, les indications du lipomodelage du sein se sont progressivement étendues et sont venues complètement modifier les indications de la chirurgie plastique et reconstructrice du sein, et de la chirurgie esthétique du sein. Cette expérience acquise au fil des années nous a conduit à élargir les possibilités de la chirurgie réparatrice du sein et ainsi élargir notre palette thérapeutique, car des cas de plus en plus complexes nous étaient adressés par nos confrères plasticiens, parfois en difficulté devant des cas exceptionnels et difficiles pour lesquels ils souhaitaient donner les meilleures chances possibles aux patientes (malformations majeures, séquelles majeures de cancer du sein, séquelles de traumatismes du sein, séquelles d’infection du sein, séquelles de chirurgie du sein), et qui ont parfois constitué de véritables challenges thérapeutiques, stimulant notre créativité chirurgicale. En parallèle de ces avancées thérapeutiques en chirurgie réparatrice, les applications en chirurgie esthétique du sein se sont développées et permettent dans des cas bien sélectionnés d’obtenir de très bons résultats tout en évitant la mise en place d’une prothèse. Toutes les indications présentées ici, ont été utilisées dans ma pratique clinique quotidienne, et ont été validées par une activité chirurgicale intense. Chaque indication fait l’objet d’un commentaire circonstancié permettant de mettre en perspective l’intérêt du lipomodelage, et des transferts graisseux au niveau du sein, dans chaque indication de chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique du sein.

 

Malformations du sein

 

Les seins tubéreux

Les seins tubéreux sont une malformation des seins, correspondant à une anomalie de la base mammaire, qui se révèle à la puberté au moment de la croissance du volume mammaire (Cf ce chapitre dans www.chirurgie-esthetique-du-sein.fr). Différentes approches chirurgicales ont été décrites, et il existe tout un éventail de techniques pour obtenir le meilleur résultat possible. Parmi ces techniques, le lipomodelage permet de corriger le manque de volume (surtout si le manque de volume est unilatéral), d’améliorer la base, et même de modifier la forme du sein. Il apparaît ainsi que le lipomodelage est une technique complémentaire très intéressante dans le traitement des seins tubéreux. Nous utilisons le lipomodelage depuis 2000 dans les seins tubéreux, et les résultats à long terme sont très intéressants avec des résultats inespérés avec les autres techniques, en termes de qualité des résultats et de caractère naturel des résultats. Coleman a également publié en 2007 de très beaux résultats de traitement de seins tubéreux par transfert de graisse au niveau des seins. Un de mes amis très réputé dans le traitement des seins tubéreux me disait un jour à la suite d’une présentation à la SOFCPRE « tes résultats sont superbes, mais tu utilises les transferts graisseux dans le sein que je n’utilise pas ». Je lui ai répondu : « Utilises les ! Tu transformeras la qualité de tes résultats, et tu éviteras de nombreux changements de prothèses à long terme à tes patientes. ».

 

Les meilleures indications sont représentées par le sein tubéreux hypotrophique unilatéral (qui nécessite en général 2 séances de transfert graisseux), le manque de plénitude du pôle supérieur du sein, et les cas bilatéraux chez des jeunes filles qui développent à la puberté une stéatomérie trochantérienne importante. Par contre, les prothèses mammaires restent une solution de choix pour le traitement des seins tubéreux avec hypotrophie bilatérale chez des patientes à faible adiposité. Très souvent, dans ces cas, il est souhaitable de combiner l’augmentation par prothèses à un lipomodelage, en réalisant une augmentation mammaire composite, qui permet dans ces cas d’obtenir les meilleurs résultats possibles.

 

Dans les seins tubéreux, chaque cas est particulier, et c’est l’analyse fine de la déformation qui permet d’avoir l’indication la plus fine, et à terme le résultat le meilleur possible. L’expérience est ici fondamentale. Compte-tenu de la rareté relative des seins tubéreux ; de la complexité des formes cliniques, et de la variété des possibilités thérapeutiques il peut être judicieux d’adresser ces jeunes filles (pour lesquelles il faut essayer de donner le meilleur résultat possible) à un opérateur particulièrement expérimenté dans ce domaine. Nous avons réalisé plusieurs travaux scientifiques sur ce sujet, dont un article publié dans Aesthetic Surgery Journal.

 

 

Syndrome de Poland

La correction des malformations thoraciques et mammaires du syndrome de Poland reste aujourd’hui encore un challenge pour le chirurgien plasticien +++(Cf ce chapitre dans www.chirurgie-esthetique-des-seins.fr). Dans cette malformation, le lipomodelage apparait une avancée majeure.  Le lipomodelage permet d’obtenir une reconstruction mammaire d’excellente qualité au prix d’interventions répétées, mais aux suites simples et à la rançon cicatricielle faible. Il s’agit d’un sujet passionnant, et nous avons eu la chance d’ouvrir cette nouvelle voie thérapeutique, et de publier plusieurs articles internationaux sur ce sujet, dont un dans Aesthetic Plastic Surgery. Dans notre expérience, une moyenne de 3 séances a été nécessaire pour obtenir le résultat escompté; avec une moyenne de 244cc transférés à chaque séance. Les résultats sont très intéressants, et permettent de reconstituer le sein pratiquement à l’identique du sein controlatéral. Il semble que cette technique constitue une véritable révolution dans la prise de la malformation thoraco-mammaire des syndromes de Poland, et constitue réellement une avancée majeure dans le traitement de cette malformation exceptionnelle.

 

Comme pour les seins tubéreux, chaque cas est particulier, et c’est l’analyse fine de la déformation qui permet d’avoir l’indication la plus fine et à terme le résultat le meilleur possible. L’expérience est ici fondamentale. Compte-tenu de la grande rareté du syndrome de Poland (1cas pour 30000) et de la complexité des formes cliniques, la courbe d’apprentissage est difficile à obtenir, il apparaitrait comme indispensable  que ces jeunes filles soient adressées à un opérateur particulièrement expérimenté dans le traitement du syndrome de Poland, et dans le lipomodelage et les transferts graisseux au niveau des seins.

 

Pectus Excavatum et lipomodelage

Le pectus excavatum est une malformation complexe du plastron sternocostal correspondant à un enfoncement antéro-posterieur. Le retentissement fonctionnel du pectus excavatum est le plus souvent nul ou minime, et il s’agit dans la plupart des cas d’un problème essentiellement morphologique et esthétique. Le retentissement mammaire est important si le pectus excavatum est très marqué, surtout dans les formes latéralisées. Les techniques de transfert de graisse permettent de réaliser une correction satisfaisante de façon isolée pour les formes légères et moyennes, ou en association avec une prothèse rigide  réalisée sur mesure à partir du scanner 3D (CT scan) pour les formes majeures. Il faut habituellement 2 séances de lipomodelage pour obtenir un bon résultat ; 3 séances dans les formes majeures. Nous avons publié un article sur ce sujet dans une revue américaine Aesthetic Surgery Journal.

 

 

Asymétries mammaires

Les asymétries mammaires par hypotrophie, avec sein controlatéral satisfaisant, constituent une des indications idéales du lipomodelage +++ et des transferts graisseux au niveau du sein. En effet avant le lipomodelage, il fallait utiliser une prothèse mammaire en silicone qui lorsqu’elle était utilisée de façon unilatérale aboutit au bout de quelques années à une nouvelle asymétrie de forme et de volume car le sein avec prothèse n’évolue pas de la même manière que le sein controlatéral normal. Nous utilisons le lipomodelage depuis 2000 dans cette indication et les résultats à long terme sont très intéressants avec une symétrie presque parfaite et un aspect et une consistance très naturels +++. D’autre part, l’intégration dans le schéma corporel se fait très facilement +++ sans le risque psychologique d’un rejet du corps étranger que représente symboliquement la prothèse mammaire. Enfin, le résultat acquis est durable, et évite les nombreuses interventions de changement de prothèse au cours de la vie. Il est d’ailleurs surprenant que l’assurance maladie ait préféré pendant des années rembourser une augmentation par prothèse pour cure d’asymétrie plutôt qu’une correction de l’asymétrie par augmentation naturelle du sein par transfert graisseux. Fort heureusement, il existe maintenant un code dans la CCAM pour cette intervention.

 

 

Agénésies et hypotrophies unilatérales sévères

La correction des agénésies et hypotrophies unilatérales sévères se rapproche de la correction des malformations thoraciques et mammaires du syndrome de Poland. Dans ces malformations, le lipomodelage apparaît, la aussi ,une avancée majeure.  Il permet d’obtenir une reconstruction mammaire d’excellente qualité au prix d’interventions répétées simples. Dans notre expérience, une 2 à 3 séances sont nécessaires, suivant la sévérité du cas, pour obtenir le résultat escompté ; avec une moyenne de 250 cc transférés à chaque séance. Les résultats sont très intéressants et permettent de reconstituer le sein pratiquement à l’identique du sein controlatéral. Cette technique, lorsqu’elle est possible du fait du potentiel graisseux de l’adolescente, constitue vraiment une avancée majeure dans la prise de ces malformations. Les résultats à long terme sont très intéressants avec une symétrie presque parfaite et un aspect et une consistance très naturels. L’intégration dans le schéma corporel est excellente, car la croissance mammaire se fait progressivement et se rapproche de la croissance physiologique du sein au moment de la puberté. Enfin, le résultat acquis est durable, et évite les nombreuses interventions de changement de prothèse au cours de la vie avec leurs risques et inconvénients.

 

 

Malformations thoraciques et asymétries thoraciques

Dans certains cas, des malformations thoraciques plus légères, souvent en rapport avec une scoliose peuvent entrainer une asymétrie thoracique et une asymétrie mammaire plus légères qui peuvent être aisément corrigées par la technique du lipomodelage. Ces malformations n’étaient souvent pas corrigées dans le passé et l’on conseillait à ces jeunes filles de rester « comme ça » car les inconvénients des autres techniques(prothèse ou lambeau) étaient trop importants par rapport à la déformation et la rapport bénéfices/risques n’était pas favorable. Avec la technique du lipomodelage ces malformations plus légères peuvent être facilement traitées et il est alors possible de prendre en charge ces jeunes patientes, et de traiter le mal-être en rapport avec ces malformations. Le lipomodelage permet ainsi ici aussi d’élargir l’arsenal thérapeutique du chirurgien plasticien.

Radionécroses et radiodystrophies du sein

 

Radionécroses après traitement conservateur du cancer du sein

La radionécrose sur traitement conservateur est rare. Elle peut survenir en cas de susceptibilité particulière aux rayons, de troubles de la microcirculation (effet combiné du diabète, ou du tabagisme), ou en cas de surdosage localisé sur le lit tumoral (par radiothérapie externe ou par fil d’iridium). Elle se manifeste par une plaie atone, sensible voire douloureuse, et qui peut s’infecter. Elle correspond à une agression tissulaire localisée avec probablement atteinte des cellules souches, qui ne peuvent plus assumer leur rôle de réparation. La solution classique était de réaliser une exérèse large de la zone de nécrose avec exérèse de la zone radiodystrophique périnécrotique, et de reconstruire la perte de substance par un lambeau musculo-cutané bien vascularisé apportant des tissus sains bien vascularisés. Constatant l’effet trophique des transferts graisseux sur les tissus traités, probablement lié à l’apport de cellules souches dont la graisse est très riche, nous avons proposé de traiter ces radionécroses par lipomodelage avec des résultats très intéressants. Gino Rigotti a eu la même approche en Italie et a publié dans Plastic and Reconstructive Surgery journal l’efficacité des transferts graisseux dans les pertes de substance en insistant sur le rôle majeur des cellules souches (Stem cells) sur la réparation tissulaire.

 

 

Radionécroses après mastectomie

Une radionécrose peut apparaître également après mastectomie du fait d’une susceptibilité particulière aux rayons, de troubles de la microcirculation (effet combiné du diabète, ou du tabagisme), en cas de surdosage localisé sur le lit tumoral (par radiothérapie externe ou par fil d’iridium) par exemple pour une tumeur envahissant le muscle grand pectoral (pectoralis major), en cas de chevauchement de champs de radiothérapie (antécédents de cancer du sein controlatéral, ou de lymphome de Hodgkin), ou en cas de radiothérapie itérative pour récidive tumoral après traitement conservateur (habituellement la radiothérapie est contrindiquée, mais parfois l’indication prime sur la contre-indication). Elle se manifeste par une plaie atone, sensible voire douloureuse, et qui peut s’infecter. Elle correspond à une agression tissulaire localisée avec probablement atteinte des cellules souches, qui ne peuvent plus assumer leur rôle de réparation. Souvent l’os sous-jacent (côtes ou sternum) est concerné par cette nécrose. Un scanner thoracique (CT scan) permet d’évaluer cette atteinte osseuse. La solution classique était de réaliser une exérèse large de la zone de nécrose avec exérèse de la zone radiodystrophique périnécrotique et exérèse de l’os nécrotique sous-jacent, et de reconstruire la perte de substance par un lambeau musculo-cutané bien vascularisé apportant des tissus sains bien vascularisés. Constatant l’effet trophique des transferts graisseux sur les tissus traités, probablement lié à l’apport de cellules souches dont la graisse est très riche, nous avons proposé de traiter ces radionécroses par lipomodelage, lorsque l’os sous-jacent n’est pas infecté, avec des résultats très intéressants. Dans les cas sévères de nécrose osseuse, la mise à plat avec exérèse osseuse de l’os sous-jacent infecté est encore nécessaire ; dans ces cas l’apport d’un lambeau est encore indispensable, mais nous utilisons le lipomodelage en complément pour régénérer les tissus périphériques (médecine régénérative), et limiter ainsi l’importance de la taille du lambeau nécessaire.

 

 

Prévention de la radionécrose

A la suite de cette expérience et en suivant nos connaissances sur les cellules souches d’origine graisseuse, il est logique de proposer le traitement sytématique des zones radiolésées sévèrement, et pour lesquelles on prévoit une évolution probable à long terme vers la radionécrose ou vers la radiodystrophie sévère. Il serait logique des ces cas d’attendre 2 à 3 ans après la fin du traitement (période de risque le plus important de récidive locale), puis d’envisager le lipomodelage et le transfert graisseux pour apporter les cellules souches (Stem Cells), qui répareront les tissus et limiteront de façon drastique le risque de survenue d’une radionécrose étendue. La chirurgie plastique et reconstructrice, comme nous l’avions pressenti des le début des années 90 (Editorial dans les Annales de Chirurgie en 1994: Place de la Chirurgie plastique et Reconstructrice en cancérologie. E Delay. Ann Chir 1994 ; 44 : 395-7) va ainsi prendre une place de plus en plus importante dans le traitement du cancer à tous les stades du traitement (préventif, curatif, traitement des séquelles).

Reconstruction du sein

En reconstruction du sein, le lipomodelage du sein, ou transfert graisseux au niveau du sein,  peut être utilisé chaque fois que l’on souhaite corriger un défaut localisé (dépression sous-cutanée) sur un sein reconstruit ou réaliser un complément de volume du sein reconstruit. La région du décolleté si fondamentale pour les patientes dans la vie relationnelle (au point que nous l’avons appelé « sein social ») constitue la zone idéale pour ce transfert de tissu graisseuxLe lipomodelage permet d’améliorer le volume, la forme, la projection, la consistance, et les contours du sein. Au niveau des seins reconstruits par lambeaux, l’apport de graisse peut apporter un volume important et peut contribuer à maintenir le caractère purement autologue de la reconstruction, et ainsi éviter la mise en place d’une prothèse avec ses inconvénients propres, surtout en terrain après radiothérapie.

 

 

Reconstruction par lambeau de grand dorsal sans prothèse

En matière de reconstruction mammaire, le but du chirurgien plasticien est d’obtenir un sein reconstruit de forme et de consistance naturelles, proches du sein controlatéral. L’utilisation d’une reconstruction autologue permet d’éviter les complications des prothèses et permet un modelage du lambeau autorisant une reconstruction d’un sein proche du sein controlatéral, permettant ainsi d’obtenir un sein reconstruit, qui sera plus stable dans le temps et autorisera une meilleure intégration au schéma corporel de la patiente. Mis au point dans notre équipe en 1992 et appliqué en pratique clinique depuis 1993, et progressivement amélioré au fil des années, le lambeau de grand dorsal sans prothèse (ou Lambeau de grand dorsal autologue LGDA) a progressivement supplanté dans notre pratique l’utilisation du TRAM Flap et du DIEP au cours de ces dix dernières années, car il permet des suites opératoires beaucoup plus simples et permet une meilleure gestion des tissus locaux thoraciques, et permet d’éviter l’effet de pièce de peau rapportée sur le sein (effet « patch »).

 

Le lambeau de grand dorsal sans prothèse, à la suite des améliorations techniques proposées ces dernières années, s’est imposé comme la meilleure technique de reconstruction mammaire autologue en terme de fiabilité, de sécurité et de qualité finale des résultats. Dans certains cas, dans le passé, le volume du sein reconstruit pouvait s’avérer insuffisant, du fait d’une patiente très mince, ou d’une atrophie importante du lambeau. Dans ces cas, la solution classique était la mise en place secondaire d’une prothèse sous le lambeau, rompant le caractère purement autologue de la reconstruction donnant une forme moins naturelle et ajoutant ses inconvénients propres. Dans d’autres cas, bien que le résultat soit globalement bon, il pouvait exister un manque de projection ou un déficit localisé (principalement en région supéro-médiale du sein, zone du décolleté) qui nuisait à l’obtention d’une reconstruction de grande qualité. La possibilité de réaliser un lipomodelage du sein reconstruit a apporté une avancée importante (voire majeure) et permet de réaliser une reconstruction mammaire autologue dans l’immense majorité des cas (98 % des cas), et seules les patientes vraiment très minces, sans aucune zone graisseuse prélevable, ne peuvent bénéficier de cette technique ou celles qui ont déjà une prothèse d’augmentation controlatérale; dans ces cas rares,  les autres techniques sont également difficilement utilisables. Le lipomodelage offre des avantages : caractère purement autologue de la reconstruction, reproductibilité et sécurité de la technique en des mains entrainées, possibilité de répéter le lipomodelage en cas de résultat insuffisant ou de cas particulièrement difficiles, et surtout possibilité d’obtenir un sein d’apparence naturelle et surtout de consistance naturelle, très proches du sein controlatéral.

 

Le lambeau de grand dorsal sans prothèse constitue le tissu le plus adapté pour recevoir les greffes de tissu graisseux car il est très bien vascularisé. Le tissu musculaire et les zones graisseuses attenantes constituent des tissus adaptés pour engendrer une revascularisation d’excellente qualité des adipocytes greffés. Au niveau du lambeau de grand dorsal sans prothèse les quantités transférées peuvent être très importantes. En début d’expérience, nous réalisions des transferts modérés de graisse, de l’ordre de 100 à 120 ml. Compte tenu du taux de résorption, l’efficacité était insuffisante et le lipomodelage permettait alors principalement de corriger des anomalies localisées ou les défauts situés au niveau du décolleté. L’expérience nous a appris que l’on pouvait transférer dans cette indication des quantités très importantes, et des transferts en une séance allant jusqu’à 500 ml par sein (pour un volume mammaire déjà conséquent) et par séance, ont été réalisés avec des résultats très bons.

 

Le transfert se fait de la zone profonde vers la superficie. Il commence du plan costal pour remonter dans le muscle grand pectoral (Pectoralis Major), puis dans le sein reconstruit, jusqu’au plan sous-cutané. Il faut réaliser de très nombreux tunnels différents, réalisant un véritable grillage tridimensionnel (3D mesh). Dans les zones où l’épaisseur tissulaire est limitée avec dépression sous-cutanée majeure, il vaut mieux y revenir à plusieurs reprises, éventuellement sous anesthésie locale. On comprend bien ici l’intérêt de disposer le lambeau de grand dorsal sur toute la base mammaire car le lambeau de grand dorsal se conçoit maintenant comme un auxiliaire (concept de la « boite de spaghettis », que nous avons proposé, pour bien faire comprendre la façon dont il faut procéder) qui va préparer le site receveur mammaire au futur lipomodelage (matrice receveuse pour la greffe de tissu graisseux), ceci est particulièrement vrai chez les patientes très minces pour lesquelles le volume final escompté (après 5 mois, correspondant au temps d’atrophie musculaire) est faible. Dans ces cas, le fait d’avoir étalé et géré son lambeau dans l’esprit d’en faire un futur site receveur au lipomodelage, permet de bien préparer le transfert graisseux. Chez les patientes, chez lesquelles le lambeau est très musculaire, nous réalisons le lipomodelage assez tôt (à 2 mois), avant le moment d’atrophie maximale, afin de profiter de l’effet volume, qui permet d’accepter suffisamment de graisse (concept de la « boite de spaghettis »: il faut avoir une boite de volume suffisant pour accepter de nombreux spaghettis graisseux).

 

Cette technique est très bien acceptée par les patientes qui voient bien l’efficacité, et comprennent bien le concept de cette intervention. Les résultats morphologiques sont considérés comme très bons par l’évaluation objective réalisés par les chirurgiens, et les patientes sont très satisfaites de cette intervention, qui améliore le sein reconstruit et permet d’obtenir un très bon résultat final, tout en diminuant des zones graisseuses disgracieuses. Pour les cas jugés insuffisants ou initialement très difficiles, les patientes comprennent très bien qu’il faut y revenir en plusieurs fois et qu’il s’agit d’une chirurgie à étapes (« technique des petits pas »), chaque étape participant à l’amélioration progressive du résultat.

 

 

Reconstruction par lambeau de grand dorsal avec prothèse

Comme nous l’avons vu plus haut, dans notre équipe nous préférons utiliser le lambeau de grand dorsal sans prothèse, qui permet d’obtenir les meilleurs résultats possibles en reconstruction mammaire en des mains très entrainées et permet de se passer de prothèse avec ses inconvénients. Cependant le lambeau de grand dorsal avec prothèse est encore indiqué dans de rares cas. Dans notre équipe, le lambeau de grand dorsal avec prothèse est indiqué en cas de patientes très minces ou de patientes souhaitant garder un fort volume mammaire alors que leur adiposité dorsale et globale est peu importante, ou dans les cas dans lesquels les patientes ont eu une augmentation mammaire controlatérale par prothèse. D’autres chirurgiens préfèrent garder la technique du lambeau de grand dorsal avec prothèse car ils n’ont pas été formé à la technique du lambeau de grand dorsal sans prothèse, ou d’autres maitrisent bien la technique du lambeau de grand dorsal avec prothèse et obtiennent déjà de bons résultats et ne souhaitent pas passer par lacourbe d’apprentissage (environ 50 reconstructions) nécessaire avec la technique autologue. Enfin dans des cas plus anciens, remontant à la période précédant la technique autologue, les patientes consultent pour une amélioration du résultat, ou un changement de prothèse. Le lipomodelage du sein peut alors être utilisé pour corriger un défaut localisé (souvent au niveau du décolleté ou de la région externe), pour améliorer le décolleté, ou pour réduire le risque de coque lors du changement de prothèse.

 

Après lipomodelage du lambeau de grand dorsal plus prothèse, il convient d’envisager dans le même temps le changement de prothèse (faire une entente préalable pour la prise en charge partielle par l’assurance maladie) car le lipomodelage peut potentiellement entrainer un traumatisme de la prothèse. Aussi, la meilleure indication d’un lipomodelage de lambeau de grand dorsal plus prothèse est lorsqu’on envisage un changement de prothèse (en cas de coque, de résultat insuffisant, ou de prothèse ancienne). Habituellement, dans les cas secondaires les patientes apprécient beaucoup l’amélioration de la souplesse, l’amélioration de la consistance du sein, et surtout l’amélioration et de sensibilité et du caractère « naturel » du sein reconstruit.

 

 

Lipomodelage des seins reconstruits par prothèse

Les défauts des reconstructions mammaires par prothèses sont principalement de trois types : défaut du décolleté avec marches d’escalier à la partie supérieure du sein et asymétrie du décolleté par rapport au sein controlatéral, défaut interne avec effet de marches d’escalier et vallée inter-mammaire trop large, et enfin défaut externe avec creux à la partie externe du sein, juste en dessous de la ligne axillaire antérieure.

 

À la suite de l’expérience acquise initialement dans le lipomodelage des seins reconstruits par lambeau de grand dorsal sans prothèse, nous avons très rapidement transposé cette expérience aux seins reconstruits par prothèses, en réalisant une Reconstruction Mammaire Composite. La technique consiste à transférer la graisse au niveau du décolleté, c’est-à-dire à la partie supéro-interne du sein, ici le lipomodelage est principalement intrapectoral.  Au niveau de la partie interne du sein, le lipomodelage est intrapectoral et entre peau et capsule lorsque le lipomodelage est réalisé lors d’un changement de prothèse. Au niveau externe, le lipomodelage se fait entre peau et capsule et ne peut être réalisé que lorsqu’il s’agit d’un changement de prothèse.

 

L’expérience nous a appris que les meilleurs résultats sont obtenus lorsque le lipomodelage est combiné à un changement de prothèse, car il peut agir au niveau des trois défauts constatés lors des reconstructions mammaires par prothèses. Les quantités transférées sont ici moins importantes et vont de 100 à 200 cc, en fonction des tissus receveurs et de la trophicité locale, et en particulier de la trophicité du muscle grand pectoral (Pectoralis Major). Les tissus étant moins vasculaires que ceux du lambeau de grand dorsal sans prothèse, il faut un peu moins saturer les tissus en graisse pour assurer une prise de greffe graisseuse satisfaisante. Il est également intéressant de réaliser un lipomodelage lors du temps initial de reconstruction par prothèse (surtout au niveau du décolleté) si l’on n’envisage pas de changement de prothèse, mais les études menées dans notre équipe ont montré des résultats moins intéressants.

 

Les résultats de notre série n’ont montré aucune complication inhérente à cette technique, en sachant que nous appliquons le principe de précaution, qui est « si le lipomodelage est venu près de la prothèse, nous préconisons un changement systématique de prothèse » pour ne pas risquer de laisser en place une prothèse qui aurait été traumatisée par la canule de transfert. Les résultats ont montré une bonne acceptation de la technique par les patientes et une forte satisfaction des patientes et du chirurgien. Cette technique permet en effet, d’obtenir des résultats qu’il était impossible d’obtenir par l’utilisation d’une prothèse seule. D’autre part les transferts graisseux réduisent le risque de coque et de récidive de coque, et permettent d’avoir des résultats plus stables dans le temps sans avoir une dégradation progressive des résultats, comme il est classique de le constater dans les reconstructions par prothèse à partir de la cinquième année (Cf les travaux de KB Clough, de Paris, qui avait bien montré la dégradation des résultats des reconstructions par prothèses après 5 ans).

 

 

Reconstruction par TRAM

Bien que le TRAM soit considéré comme une des techniques donnant de très bons résultats en reconstruction mammaire, des défauts peuvent également apparaître après utilisation de cette technique, en particulier des asymétries de volume, un manque de projection ou un défaut du décolleté lié à une atrophie de la partie haute du grand pectoral (Pectoralis Major) secondaire à l’action conjointe du curage axillaire et de la radiothérapie pariétale.

 

Nous avons appliqué le lipomodelage à la reconstruction mammaire par TRAM, depuis l’année 2000, pour nos propres cas, ou pour des cas secondaires. Lors du temps de retouches secondaires, nous réalisons un lipomodelage intrapectoral et un lipomodelage  du lambeau en insistant sur les zones qui présentent un manque de plénitude et une dépression. Dans certains cas, un lipomodelage visant à augmenter le volume global des lambeaux a été réalisé sans difficulté particulière. Il faut savoir, dans ces cas, transférer un peu moins de graisse que l’on pourrait le faire dans un lambeau de grand dorsal sans prothèse, car le TRAM est moins vascularisé, et cela peut exposer plus facilement au risque de cytostéatonécrose.

 

Dans cette indication, je n’ai relevé aucune complication inhérente à cette technique et les buts recherchés ont été obtenus, à savoir une amélioration de la forme globale du sein et une amélioration de la partie haute du décolleté et finalement des résultats considérés comme très bons. Dans le cas d’un TRAM, le lipomodelage est particulièrement pertinent car le prélèvement de graisse abdominale et latéro-abdominale permet des retouches fines au niveau du site abdominal et latéro-abdominal donnant une harmonisation plus globale de la région thoraco-abdominale, particulièrement appréciée des patientes. Surtout, pour les cas secondaires avec défaut de la partie haute du sein, cette technique permet d’éviter de déplacer le lambeau et réduit ainsi le risque justement redouté de nécrose du lambeau (qui serait dramatique), complication toujours possible lors de déplacement secondaire du lambeau.

 

 

Reconstruction mammaire par DIEP

La reconstruction mammaire par DIEP a fait l’objet de nombreuses communications et articles ces dernières années, dans lesquels les promoteurs ont souvent présentées cette technique comme la technique la plus récente, la plus pointue, et la plus moderne. Il s’agit, àmon sens plus de « marketing » que de réalité scientifique. En fait, il ne s’agit pas d’une technique réellement nouvelle. En 1991, j’avais consacré mon mémoire de fin de spécialité de Chirurgie Plastique reconstructrice et esthétique à la Reconstruction mammaire par lambeaux libres, et cette technique était déjà bien présentée dans ce mémoire. Elle consiste à transférer la palette cutanéo-graisseuse abdominale inférieure sur des vaisseaux perforants provenant des vaisseaux épigastriques inférieurs profonds, puis à venir les ré-anastomoser par microchirurgie au niveau des vaisseaux mammaires internes. Cette intervention, très belle techniquement, nécessite un temps microchirurgical, qui allonge l’intervention et expose à un risque de nécrose et de perte du lambeau avec ses conséquences dramatiques pour la patiente, et très anxiogènes pour toute l’équipe chirurgicale.

 

En 1991, je pensais que cette intervention serait amenée à se développer, comme je l’avais écrit dans mon mémoire. En 1992, alors que je visitais un de mes confrères spécialiste en reconstruction mammaire, et en microchirurgie et considéré comme un des meilleurs micro-chirurgiens au monde, ce confrère avait été confronté à un cas difficile avec une microchirurgie ne se passant pas aussi bien que prévu, si bien qu’à 20 heures le soir (pour une intervention commencée à 8 h), l’intervention était encore en cours. A la suite de cette visite, j’ai dû revoir ma stratégie chirurgicale, et j’ai alors mieux réfléchi, et compris que la reconstruction mammaire par lambeaux libres (DIEP, grand fessier) si elle pouvait apporter une solution élégante dans certains cas particuliers, elle ne pourrait pas devenir une technique de première intention permettant de traiter les nombreux cas de reconstructions mammaires, en mettant en perspective, qu’en France,chaque année 20000 patientes subissent une mastectomie (mastectomie initiale lors du cancer du sein initiale, ou mastectomie pour récidive de traitement conservateur). Il fallait donc travailler sur une technique plus fiable, et réalisable de façon normale en secteur privé, ou en secteur hospitalier, mais avec des moyens raisonnables, et avec une durée opératoire plus acceptable.

 

De façon contemporaine, un de mes confrères le Dr Patrick Zlatoff, chirurgien cancérologue réputé, me disait alors que je lui présentais une conférence que je préparais sur le TRAM: « il faudrait que tu trouves une technique qui donne un résultat comme un TRAM ou un DIEP, mais qui soit moins lourde et ait la fiabilité d’un grand dorsal ». L’ensemble de ces éléments ont fait que j’ai orienté mes recherches sur la mise au point du lambeau de grand dorsal sans prothèse et développé de façon préférentielle cette technique, gardant la reconstruction par lambeaux libres qu’aux cas exceptionnels ne pouvant être traités par lambeaux pédiculés. D’autant qu’en reconstruction mammaire différée le DIEP, comme le TRAM, donne un effet de « pièce rapportée » sur le sein qui apparaît peu naturel, et moins joli qu’avec le lambeau de grand dorsal combiné au lambeau d’avancement abdominal avec enfouissement total du lambeau.

 

Bien réalisé, et sans complication fâcheuse, le DIEP peut donner de bons ou de très bons résultats en reconstruction mammaire, mais des défauts peuvent apparaître, en particulier des asymétries de volume, un manque de projection ou souvent un défaut au niveau du décolleté. Nous avons appliqué le lipomodelage à la reconstruction mammaire par DIEP essentiellement pour des cas secondaires, chez des patientes qui étaient non complètement satisfaites du résultat, et qui nous ont consultés pour envisager une amélioration et une reprise de la reconstruction. La technique est exactement la même qu’après reconstruction mammaire par TRAM : nous réalisons un lipomodelage intrapectoral et un lipomodelage  du lambeau en insistant sur les zones qui présentent un manque de plénitude et une dépression. Dans certains cas, un lipomodelage visant à augmenter le volume global du sein a été réalisé sans difficulté particulière.

 

Les résultats obtenus ont été très satisfaisants avec une amélioration de la forme globale du sein et une amélioration de la partie haute du décolleté. Dans le cas du DIEP, le lipomodelage est particulièrement pertinent car le prélèvement de graisse en région abdominale et latéro-abdominale permet des retouches fines au niveau du site abdominal donnant une harmonisation plus globale de la région thoraco-abdominale, particulièrement appréciée des patientes. Pour les cas secondaires avec défaut de la partie haute du sein, cette technique permet d’éviter de déplacer le lambeau et évite le risque redouté de complication à type de nécrose totale du lambeau, dont on m’a rapporté un cas avec ses conséquences dramatiques pour la patiente et pour son chirurgien. Enfin, j’ai été confronté à une patiente qui avait bénéficié d’une reconstruction mammaire bilatérale par DIEP et dont malheureusement un des deux DIEP, pourtant réalisés dans une des meilleures équipes européennes, avait nécrosé. J’ai pu réaliser la reprise de cette reconstruction par un lipomodelage exclusif (Cf ce chapitre) et permettre à cette patiente d’obtenir une reconstruction mammaire autologue de bonne qualité, malgré cette complication fâcheuse et très désagréable.

 

 

Reconstruction mammaire par lipomodelage exclusif

Compte tenu de l’enthousiasme suscité par le lipomodelage dans notre équipe, nous avons mis au point en 2001, la reconstruction mammaire par lipomodelage exclusif (il est singulier de voir certains présenter cette technique comme une nouveauté ! et de se faire « mousser » en la présentant comme une avancée récente) Cette technique est aussi développée (depuis 2006) avec beaucoup d’enthousiasme et d’énergie par le Dr Roger Khouri, inventeur du Brava et le Dr Gino Rigotti, qui en ont élargi les indications avec l’utilisation conjointe du Brava, afin de préparer et distendre les tissus locaux. Elle s’applique principalement aux patientes présentant un volume mammaire controlatéral de faible volume, et ayant des stéatoméries prélevables (typiquement patiente mince du haut et graisseuse du bas du corps). La technique consiste à reconstruire le sein en plusieurs temps opératoires, en utilisant exclusivement le transfert de graisse. Dans les indications définies plus haut, il faut 3 à 4 séances de lipomodelage pour obtenir un sein en rapport au volume controlatéral, si la patiente n’a pas eu de radiothérapie, et 5 à 6 séances si la patiente a eu de la radiothérapie pariétale. Ce protocole thérapeutique a fait l’objet d’une évaluation (nous avons d’ailleurs publié un article récent, sur ce sujet, dans une revue américaine de référence : Clinics in Plastic Surgery 2017), et est très intéressant pour des cas particuliers de reconstructions mammaires chez des patientes à faible volume mammaire, ou dans des cas de rattrapage d’échec de reconstruction mammaire. Lorsque le volume mammaire est plus important, l’utilisation du Brava et la multiplication des séances permettent d’y arriver, mais il est souvent préférable d’amorcer la matrice initiale (la « boite de spaghettis ») par un lambeau de grand dorsal sans prothèse, ou un lambeau perforant, afin de permettre la reconstruction en un nombre d’intervention raisonnable. Il faut toute la finesse d’une longue expérience clinique de l’opérateur pour poser des bonnes indications, et permettre de mener le projet à terme.

La reconstruction par lipomodelage exclusif est enfin une technique de choix lorsqu’elle est possible pour les cas secondaires. Avec l’expérience, des cas difficiles, après échec des autres techniques à la suite de complications survenues dans d’autres équipes, nous sont régulièrement adressés. Lorsque les principales solutions classiques ont été utilisées, le lipomodelage apporte alors une solution « miraculeuse » pour les patientes, car il permet par quelques interventions aux suites simples, et à risque limité, de sortir de cette impasse thérapeutique. Cela permet une reconstruction de qualité, sans la rançon cicatricielle, et le risque potentiel d’échec d’un nouveau lambeau, qui devrait alors être un lambeau libre, soumis aux aléas naturels de la microchirurgie. J’ai été également confronté à des cas de patientes, qui, bien qu’ayant eu une reconstruction qui paraissait techniquement réussie (c’est-à-dire sans complication), refusait la nouvelle image d’une reconstruction par prothèse avec un sein qui leur paraissait peu naturel, trop gros, et « artificiel ». Après plusieurs consultations pour bien évaluer la demande des patientes dans ces cas particuliers, et tenter de prévoir si elles pouvaient être satisfaites de la nouvelle image corporelle proposée, il est alors possible de remplacer (dans des cas favorables) la prothèse par un lipomodelage itératif, pour les patientes à petits seins.

 

 

Reconstruction mammaire par lambeau pectoro-mammaire

Le lambeau pectoro-mammaire a été mis au point en 1998 dans notre équipe. Il est encore d’utilisation rare, mais il devrait être utilisé plus souvent. Il consiste à reconstruire la peau du sein par un lambeau d’avancement abdominal, et le volume du sein par une partie du sein controlatéral vascularisé par le pédicule acromio-thoracique. Les indications doivent être précises. Il faut que soient réunies différentes conditions : lambeau d’avancement abdominal de bonne qualité et bien vascularisé, sein controlatéral hypertrophié, et risque controlatéral de cancer du sein faible (car on transfère du sein controlatéral, et il ne faut pas transféré du sein malade). Cette technique est élégante dans de très bonnes indications. Afin de compléter le volume du sein reconstruit et d’améliorer sa forme, le lipomodelage est utilisé lors du deuxième temps opératoire pour améliorer l’un ou l’autre sein et obtenir la meilleure reconstruction possible. Avant la réalisation du lambeau pectoro-mammaire un bilan d’imagerie précis est réalisé afin d’éliminer une lésion sur le sein controlatéral dont on va utiliser une partie comme lambeau. De même, à distance de l’intervention un bilan d’imagerie précis est réalisé pour permettre le suivi radiologique qui redevient bilatéral avec cette technique. Les avantages de cette technique sont d’éviter l’utilisation d’un lambeau à distance, et de donner un sein de consistance très naturelle.

 

 

Lipomodelage pour préparer les tissus locaux

Lorsque la peau est très fine, ou très abîmée par la radiothérapie, et que l’on redoute une nécrose cutanée lors du temps de reconstruction du sein, il est possible de réaliser, environ 3 mois avant le temps de reconstruction proprement dite, un lipomodelage préparateur de la reconstruction, en transférant 80 à 200 cc de graisse dans les tissus thoraciques endommagés et fins. La trophicité de la peau est améliorée, et cela permet souvent d’éviter une nécrose cutanée, redoutée et  difficile à gérer même en cas de reconstruction mammaire autologue. Dans le même esprit, il est possible dans certains cas de préparer la peau et d’épaissir le tissu cellulaire sous-cutané pour permettre l’utilisation d’une reconstruction par prothèses dans des cas d’indications limites où un lambeau serait techniquement préférable, mais dans lesquels la patiente ne le souhaite pas, et préfère tenter l’utilisation d’une prothèse, au moins en première intention.

 

 

Symétrisation et lipomodelage

Le lipomodelage permet dans certains cas de symétriser le sein controlatéral, notamment en améliorant le décolleté par un lipomodelage intrapectoral et mammaire supérieur, voire en augmentant très légèrement le volume du sein controlatéral. Dans cette indication, un bilan d’imagerie pré-opératoire précis est réalisé (mammographie et échographie), avec un contrôle d’imagerie à 1 an par le même radiologue. Selon les recommandations de la SOFCPRE, cette indication est réservée actuellement à des équipes multidisciplinaires très entrainées au lipomodelage, au diagnostic et au suivi du cancer du sein, afin de limiter le risque de coïncidence avec un éventuel cancer du sein controlatéral.

 

 

Lipomodelage de symétrisation

Après une reconstruction mammaire, il est souhaitable de garder un poids stable pour garder la symétrie la meilleure possible. Dans certains cas, la patiente modifie son poids dans le temps avec parfois une perte de volume du sein controlatéral entrainant alors une asymétrie. Dans d’autres cas, ce sont les traitements hormonaux prescrits lors du cancer du sein qui peuvent entrainer une modification du volume du sein. Enfin, dans de rares cas la réduction du sein controlatéral pour symétrisation a été un peu trop marquée, et le sein réduit est alors trop petit. Pour ces cas, on se trouvait bien démuni avant la technique du lipomodelage. Il est maintenant possible de façon simple de redonner une plénitude au sein controlatéral et d’améliorer la symétrie mammaire. Dans cette indication, un bilan d’imagerie pré-opératoire précis est réalisé (mammographie et échographie), avec un contrôle d’imagerie à 1 an par le même radiologue. Selon les recommandations de la SOFCPRE, cette indication est également réservée actuellement à des équipes multidisciplinaires très entrainées au lipomodelage, au diagnostic et au suivi du cancer du sein, afin de limiter le risque de coïncidence avec un éventuel cancer du sein controlatéral toujours possible.

Séquelles d’infections et d’abcès sein
Séquelles d’infections du sein de l’enfance

Les mammites du sein, néo-natales ou de la petite enfance, se résolvent habituellement simplement par des soins locaux et par une antibiothérapie bien conduite. Dans des cas exceptionnels un drainage local est réalisé, et peut conduire à une atteinte du bourgeonmammaire. Lors de la croissance mammaire, le bourgeon mammaire ne permet pas alors la croissance normale du sein. Dans ces cas il faut envisager la correction du sein qui ne se développe pas et le lipomodelage représente ici une solution élégante pour permettre la correction de cette séquelle post-infectieuse et post-thérapeutique. En 2 à 3 séances de lipomodelage on peut restaurer une morphologie mammaire normale ou subnormale. Des gestes de fasciotomies sont réalisés sur les zones d’adhérence pour permettre une expansion satisfaisante de l’étui cutané mammaire. Bien que ces cas soient exceptionnels, l’indication de lipomodelage mérite ici d’être connue car les techniques disponibles auparavant, que ce soit les lambeaux ou la mise en place de prothèse ne donnaient pas de résultats satisfaisants. Le lipomodelage, au prix d’une intervention aux suites post-opératoires plus simples permet d’obtenir des résultats sans commune mesure avec ce qu’il était possible d’obtenir avant cette technique.

 

 

Séquelles d’abcès du sein lors de l’allaitement

Un allaitement bien conduit se passe habituellement très bien. Dans des cas exceptionnels  peuvent apparaître un engorgement, qui peut lui-même conduire à un abcès du sein. Un traitement local est alors nécessaire, associé à une antibiothérapie par voie générale. Les choses rentrent finalement dans l’ordre, mais peuvent entrainer une séquelle au niveau du sein à titre de déformation. A distance de l’épisode infectieux, lorsqu’on est sûr qu’il n’y a aucune infection locale résiduelle, on peut corriger la dépression sous-cutanée par 1 ou 2 séances de lipomodelage, qui permettent de redonner un galbe satisfaisant au sein et permettent d’oublier cette complication de l’allaitement.

 

 

Séquelles d’abcès du sein hors allaitement

Certaines patientes développent des abcès récidivants du sein. Il s’agit toujours de cas très difficiles. Des facteurs comme letabagisme, qui doit absolument être arrêté, et également des facteurs psychosomatiques qui nécessitent une prise en charge psychologique spécifique, doivent être pris en compte. A distance, lorsqu’on est sûr qu’il n’y a plus de foyers infectieux sous-jacents, on peut corriger la déformation et la dépression du sein par une 1 ou 2 séances de lipomodelage. Cette situation est toujours délicate à prendre en charge pour le chirurgien, car le risque de récidive d’une infection du sein est toujours possible du fait de l’évolution naturelle de la maladie, qui peut donner spontanément des récidives infectieuses locales. Il faut bien expliquer ceci à la patiente, et faire la part des choses pour qu’en cas d’infection elle ne reproche pas au chirurgien une poussée infectieuse, et qu’elle comprenne qu’il s’agit de l’histoire naturelle de la maladie. Inversement le fait d’améliorer la morphologie mammaire peut améliorer les aspects psychologiques, et indirectement pourrait permettre d’éviter certaines récidives infectieuses. Dans ce genre de situation délicates, habituellement on temporise, et l’on voit les patientes plusieurs fois avant l’intervention afin d’évaluer la situation locale, l’arrêt de l’intoxication tabagique, et la prise en charge de la situation psychologique sous-jacente.

 

 

Séquelles après infection post-chirurgicale

Toute chirurgie du sein peut conduire à une infection locale. En cas d’infection locale post-chirurgicale, il faut réaliser un drainage local, et si possible déclive, et mettre en place une antibiothérapie adaptée. Dans certains cas, l’infection locale peut entrainer une destruction locale des tissus mammaires, et entrainer une déformation du sein. A distance de l’épisode infectieux (il est souhaitable d’attendre 6 mois à 1 an après la guérison complète de l’infection), on peut envisager une correction de la déformation par un lipomodelage du sein, ou greffe de tissu adipeux, pour combler la dépression et atténuer la déformation résiduelle post-infectieuse. Dans ces situations délicates, la patiente doit être prévenue que spontanément elle peut avoir une récidive infectieuse locale. Habituellement on explique à la patiente qu’un lipomodelage du sein donne un risque infectieux très faible, mais ce risque peut être multiplié par 2 ou 3 dans une situation comme celle-ci. En cas d’infection locale il faudra revoir la patiente rapidement pour traiter cette infection locale par application de glace, drainage, et mise en place d’une antibiothérapie adaptée.

 

Les cas secondaires qui nous ont été adressés et que nous avons eus à prendre en charge se sont passés dans de bonnes conditions, sans récidive infectieuse locale. On a pu obtenir une bonne correction de la déformation, ce qui a donné un état esthétique et morphologique mammaire satisfaisant, et a permis à la patiente d’oublier cette complication toujours désagréable pour la patiente et pour le chirurgien qui avait pris en charge initialement la patiente.

Séquelles de chirurgie du sein – Séquelles après exérèse de tumeurs bénignes du sein

 

Séquelles après exérèse de tumeurs bénignes du sein

L’exérèse des tumeurs bénignes du sein comme des fibro-adénomes ou des foyers de mastose suspects, ne donne habituellement peu ou pas de séquelle au niveau de la morphologie du sein. Dans certains cas, parce que le chirurgien redoutait une lésion non bénigne, ou parce que la lésion était particulièrement volumineuse, une séquelle à type d’asymétrie ou de déformation du sein peut apparaître. Pour corriger cette déformation, la solution classique était de mettre en place une prothèse, mais cette solution corrigeait de façon grossière la déformation et avait pour inconvénient d’engendrer une asymétrie mammaire, car du coté de la prothèse le sein n’évoluait plus de la même façon que le sein controlatéral. La technique de lipomodelage a permis de corriger de façon élégante ces déformations post-thérapeutiques. En transférant la graisse de façon étagée, en libérant les zones d’adhérence par des fasciotomies, il est possible de restaurer un galbe mammaire proche du sein initial, c’est-à-dire de permettre une restitution pratiquement ad integrum. Habituellement 1 séance est suffisante pour corriger une déformation modérée. Si la déformation est plus importante, une 2ème séance 3 mois plus tard peut alors être nécessaire pour corriger la déformation et obtenir un bon résultat.

 

 

Séquelles de réduction mammaire

La réduction mammaire pour hypertrophie mammaire donne dans l’immense majorité des cas des bons, ou des très bons, résultats. Dans certains cas, une complication peut apparaître, qu’il est habituellement facile de corriger et qui n’entraîne pas de séquelle. Encore plus rarement, surtout dans le cas de seins très importants, type gigantomastie, ou de réduction chez des patientes présentant des facteurs de risque associés comme le diabète ou le tabagisme +++, il peut apparaître une nécrose de l’aréole (1% des cas dans le cadre d’une gigantomastie), ou une nécrose localisée du sein. Il faut alors gérer cette complication, permettre la cicatrisation par des soins locaux attentifs. Puis, plus tard, restaurer la morphologie mammaire par la chirurgie réparatrice. Nous avons pris en charge un certain nombre de complications de ce type, qui nous avaient été adressées par des confrères qui étaient ennuyés à la suite de leur survenue. Nous avons pu corriger ces cas de déformations du sein par des séances de lipomodelage. Chaque cas est ici particulier. La prise en charge doit être très attentive, à la fois sur le plan technique car il s’agit de cas difficiles, mais également sur le plan psychologique car les patientes sont souvent dans une situation psychologique difficile à la suite de cette complication, alors qu’elles attendaient un bon résultat de leur intervention initiale et sont parfois déçues du résultat. Le lipomodelage trouve ici une de ses indications de choix, car il permet d’améliorer de façon importante la qualité du résultat sans rajouter de cicatrices supplémentaires, ou de contraintes très importantes. Souvent sont associées des zones de cytostéatonécroses qu’il faut savoir traiter par une lipo-fragmentation de façon à les réduire. Ultérieurement un temps de lipomodelage sur ces zones permet de redonner une souplesse satisfaisante au sein. Dans les cas que nous avons traités, le lipomodelage a permis de redonner des seins harmonieux avec une morphologie satisfaisante et une bonne symétrie, et de sortir de façon élégante de cette situation difficile pour les patientes victimes de la complication, et pour les chirurgiens confrontés eux-mêmes à cette complication et à ses conséquences très désagréables pour les patientes.

 

 

Séquelles après cure de gynécomastie

La cure de gynécomastie donne le plus souvent de très bons résultats si l’on prend soin de garder une épaisseur du tissu cellulaire sous-cutané satisfaisante au niveau de la peau du sein, et au niveau de la région rétro-aréolaire. Dans certains cas une zone d’adhérence peut se faire, entraînant une dépression sous-cutanée, rétro-aréolaire, ou sur la surface du sein, et qui peut engendrer une séquelle esthétique gênante pour les patients. Dans ces cas il est facile de corriger la dépression sous-cutanée par un lipomodelage. On transfère de la graisse au niveau de la zone en dépression, et on réalise des gestes de fasciotomies de façon à corriger la dépression. On peut ainsi retrouver un résultat satisfaisant au prix d’une intervention relativement simple, avec des contraintes postopératoires acceptables.

 

 

Séquelles après mastectomie pour trans-sexuallisme

La mastectomie pour transsexualisme doit être réalisée normalement lorsque la patiente a changé de sexe au point de vue de l’état civil, sans possibilité de retour en arrière, ceci après une expertise psychologique personnelle soigneuse. Nous avons été amenés à prendre en charge des patientes qui avaient subi à l’étranger une mastectomie sub-totale car elles désiraient à l’époque changer de sexe. Elles ont ultérieurement changé d’avis, et nous ont consultés quelques années plus tard pour une réparation mammaire. Nous avons pu restaurer la morphologie mammaire par 2 séances de lipomodelage, la 1ère séance prélevant la graisse en région abdominale, et la 2ème séance au niveau des cuisses. Des gestes de fasciotomies ont permis de libérer des zones d’adhérence fibreuse, et ont permis de restaurer un sein d’apparence normale, en harmonie avec la morphologie de la patiente. Cette technique de lipomodelage est très intéressante dans ces cas où le sein a été déformé, où il n’y a pratiquement plus de segment 3, et cette restauration progressive permet de restaurer un sein de consistance, de morphologie, et de sensibilité pratiquement normales. Il s’agit d’une voie très intéressante dans ces cas rares de patientes se retrouvant dans cette situation très particulière.

 

 

Séquelles de chirurgie cardiaque de l’enfance

Les malformations cardiaques sévères de l’enfance nécessitent une chirurgie cardiaque, avec abord habituellement sternal et également parfois latéral. En cas d’abord latéral, dans la petite enfance, la zone cicatricielle latérale gauche entraîne une déformation du sein, et lors de la croissance mammaire, la zone de fibrose empêche le développement harmonieux du sein, entraînant une hypotrophie et un sein extrêmement déformé. Nous avons pu prendre en charge des patientes ayant eu des séquelles de ce type, et au prix de 2 séances de lipomodelage, nous avons pu corriger de façon étonnante cette déformation importante, et ainsi permettre à ces jeunes femmes de retrouver une morphologie mammaire satisfaisante, et de traiter la séquelle physique et psychologique importante, entrainée par la déformation mammaire faisant suite à la chirurgie cardiaque de l’enfance. Nous avons d’ailleurs publié des cas que j’ai opéré dans les Annales de Chirurgie Plastique (article que j’ai fait signé en premier à un de mes jeunes élèves, qui est maintenant chirurgien).